Illusions et Tempêtes
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Fate is a bitch ~Clide ~

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Message par Maluenda Caliente Ven 21 Déc - 22:00

7ans plus tôt .

La Diva, la Madone s'est arrêtée. Mue par une force plus puissante que sa Faim, plus meurtrière que sa rage grondante. Ils sont reliés par cette composante de leurs caractères en grincements acides. L’orgeuil, l’arrogance, l’Hubris. Clide n’a pas cédé à la Nuit qu’elle lui offrait. Il n’a pas rendu sa piètre parure mortelle pour embrasser ses élans de ténèbres. Tout. La catin de cristal déposait tout à ses pieds. Il ne l’a pas choisi. Et cela ? Cela est son crime le plus impardonnable. Ho, elle aurait pu achever la transformation, broyer sa volonté et attendre avec son Infant ses premiers appétits. La voie aurait été facile. Décevante. Il professait amour et passion tout en continuant de la rejeter à son plus intime.
Non. Jamais. Au plus sourd de ses transports, elle a arraché ses crocs de cette gorge béante. A tari le flot bouleversant de sa vitae qui rejoignait sa vie déchue. Elle a refusé d’écouter plus lomguement le tumulte de ses émotions, l’affre d’un coeur qui se brise à nouveau. Combien de fois ? Combien de fois devra t’elle souffrir pour Clide Dagorn ? C’est terminé. Au porte de l’inconscience, déraciné par son manque d’hémoglobine, il n’a pas réagit à son changement d’état. Quand il revient à la vie, il a été transfusé. Son épiderme garde les cicatrices des canines perforantes, mesquinerie de l’Italienne qui a refusé de les faire disparaitre. Mesquinerie ou rappel permanent... Il se trouve dans un appartement desert, avec la seule présence d’une infirmière muette pour l’assiter dans son retablissement. La Princesse Rouge n’est pas à ses cotés, pas d’avantage qu’il ne sentira ses ailes silencieuses.

Décembre 2018

Il n’a pas fallu longtemps à Maluenda pour retrouver sa place au sein de la cour. Elle devient l’une des plus influente conseillère du Prince. Par ses avis, ses murmures, l’Artiste aide à maintenir l’équilibre entre les différentes factions qui peuvent se heuter. Elle a deserté Varsovie pour une villégiature à Cracovie, refusant de fouler le sol de ses premiers mois en Pologne. Malgré leurs protestations, elle a libéré de son service David et Anna. Elle a tourné le dos à toutes les folies de l’Angleterre. Son Art est à nouveau florissant et ses chasses, bien que revetues d’un vernis de discrétion sont un carnage absolu. Sa Bête court librement les terres ouvertes et les esprits se souviennent des anciennes légendes. Pourtant. Pas un cadavre ne jonche les rues. Pas un article de journaux. Une fille du Vent et des Tenèbres, détachée de la société humaine. Ou presque.

-Ma dame, ose murmure le serviteur vouté par les ans, seul non Immortel a avoir accès à la redoutable main de Cain.
-Tu as dix secondes pour m’expliquer la raison de ton intrusion, chante le ton de l’Impérieuse. J’ai un rendez vous à la Cour dans moins de deux heures. Le retard ne me sied pas.
-Vos agents. Ils ont repéré Philémond de Boiseaux. A Varsovie.
La main s’immobilise au dessus d’une soierie, oubliant un bref instant d’en refermer les boutons. Puis le geste se poursuit. Fausse indolence.
-Il a retrouvé votre trace. Il a été vu parcourant les ruines du Royaume Anglais. Si... vous les aviez autorisé à...
-Seriez vous en train de me faire la leçon sur la manière dont je dois mener mes affaires, Bartek ?
Elle vient de le vouvoyer. Malgré les ans qui grippe ses genoux, il tombe à terre, le regard brisé sur le sol, refusant de voir la silhouette qui le surplombe.
-Non, non, ma Dame. Il a retrouvé votre trace. Je crains pour votre sécurité.
-Mais ce n’est pas Ma trace qu’il a reniflé. C’est la Sienne, n’est ce pas...
-Il ne sait plus rien. Si vous le laissez à Philémond, vous garantissez votre sécurité. Pas un membre de la Cour ne pépiera votre présence en Pologne, ils ont plus peur de vous que de lui.
-Fols qu’ils sont. Prépare ma voiture.
-Pour aller voir le Prince ? son audace le terrorise.
-Tu sais que non.

******

Son chignon est parfaitement maintenu, tirant avec sévérité ses mèches de cheveux sans qu’elles ne puissent espérer s’en échapper. Son maquillage habille son visage de poupée et attire l’attention sur ses lèvres d’un rouge intense. Elle a conscience des regards qui glisse sur ses formes graciles à mesure qu'elle traverse le club d'un pas de cavlière dantesque. Une table se vide immédiatement à son approche et les consommateurs s'envolent sans comprendre cet instinct de survie. Son charisme immortel la trahit, mais sa tenue dénote pour l’endroit où un verre de mauvais alcool se tient devant elle. Pourtant, Maluenda habite les ténèbres et sa silhouette est presque invisible. Le talon de ses hautes bottes de daim est parfaitement silencieux sur le sol. Elle rajuste la veste de son terriblement strict tailleur pantalon d’un gris antharcite. Une avocate en ballade. Si sa taille fine n’était pas mise en valeur par un serre-taille blanc délicieusement ouvragé, dont les lisereret de fils d’or et d’argent égayent sa chemise de la teinte de sa bouche. Il est à peine 20h. Encore une heure ou deux et il devrait faire son apparition. Si elle en croit les rapports qu’elle ne lit plus et qui lui parviennent quand meme.
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Message par Clide Dagorn Mer 26 Déc - 19:27

Un miroir oblong d’ascenseur. Un miroir qui a vu défiler dans l’habitacle exigu quantité de duos abracadabrantesques. Ce soir, émergeant des sous-sols dont les accès sont mieux gardés que le portique des Enfers, deux hommes de bonne carrure. Un grand libanais, à l’iroquoise fatiguée, dont les mains couturées pianotent à plaisir la rampe de la cabine, et dont le regard braque attend impatiemment l’ouverture du double battant, comme s’il allait y entrevoir les premières lueurs du jour. Hassan sifflote une rengaine presque sinistre dans le silence mortifiant. A peine plus petit, son binôme a l’air nettement moins bohème.  Ce qu’il perd en hauteur, il le gagne néanmoins en largeur, arborant des épaules râblées qui semblent à l’épreuve des terribles grêles polonaises. Cheveux courts, des yeux havanes, qui ont la teinte des vieux chablis usés de soleil qui, malgré toutes les tempêtes, gardent les racines bien ancrés dans le sol. Sur ses épaules, un vieux perfecto dont le cuir épais procure une armure de buffle, et qui a bien du dévier quelques projectiles si l’on en juge les étranges hardouées arborés ça et là. Clide s’observe, dans le miroir sirénien. Du foulard amarré à son cou déborde une méchante estafilade. L’espace d’un instant, il tire l’étoffe gazeuse et met à nu une mutilation terreur, qui darde péniblement sa trachée estropiée. Ses pensées s’égarent, alors qu’il esquisse d’un doigt la terrible cicatrice.

- Tu m’as jamais dit. T’as été dompteur, dans une autre vie ? Demande Hassan, sur le ton de la rigolade.
- Ouais, répond Clide sur un ton vague, absorbé par des pensées précipices.

Hassan n’est pas du genre à tirer les vers du nez. Clide, pas vraiment le style à combler les blancs gênants, dans les ascenseurs, au moyen d’historiettes sinistres. La double porte s’ouvre enfin, dans un tintement cristallin, donnant sur un vaste parking baigné d’obscurité. Comme s’ils s’étaient déjà concertés, comme s’ils s’étaient déjà tout dit, les deux hommes avancent de la démarche d’un seul homme, aussi synchrones que deux frères loups s’en allant à la brune dans les forêts giboyeuses. Deux prédateurs s’en allant chasser. Les pans de leurs blousons ne masquent pas tout à fait les reliefs des holsters, des calibres, des chargeurs qui lestent les ceinturons. Les autres les attendent sur place. Ils arriveront pour le clou du spectacle, pour le feu d’artifice. Ils sont les fers de lance de l’organisation. Hassan est imprévisible, détraqué par le sang et la violence, amoureux des massacres gratuits. Clide n’a pas grand-chose qui le retienne en ce bas monde hormis la haine et un piètre bouquet de coronaires. Ils sont les francs tireurs de la Hałastra, un doux sobriquet dont les Vampyrs de Pologne les ont baptisés. Visiblement, ils aiment bien, portant fièrement l’insigne.

Cette nuit, peu de sang pour répondre aux appels de la lune rousse. Rien que de la cendre, s’envolant dans le vent âpre venu de Russie. Une petite fête d’immortels copieusement gâchée. Les réjouissances avaient lieu dans une villa cossue de banlieue. Des fontaines emplies de sang rubicond, des esclaves sexuelles, des hommes et femmes transformés en amuse-gueule pour le bon plaisir d’antiquités en queue-de-pie. Mais la Hałastra a frappé. Telle l’ombre d’un épervier surprenant une couvée de passereaux. Les Vampires de Pologne commencent à se ronger les sangs devant cette menace de plus en plus palpable et dont le siège reste un secret bien gardé. Les Vampires de Pologne commencent à se tourner vers leurs homologues allemands, français, italiens, caressant l’idée d’étouffer dans l’oeuf les exactions de cette engeance, dont les chasseurs leurs glissent délicieusement entre les griffes. Oh bien sûr, quelqu’uns sont morts au cours d’échauffourées. Quelqu’uns ont été capturés et soumis à la torture. Mais ils n’ont pas parlé. La mancie de leurs esprits, de leurs yeux et de leurs coeurs n’a par ailleurs rien révélé, comme si ces simples mortels avaient trouvé alliés auprès de sans-entrailles transfuges. Et si Varsovie perdrait son attrait de paradis vampirique ? La guerre passée, la Pologne pourrait-elle redevenir un fief d’affrontement sanglant ?

Trois nuits plus tard. La température semble un peu plus douce qu’à l’accoutumée. Clide se faufile entre les noceurs et les badauds dans les quartiers douteux de Varsovie. Il connaît le tortil de ses rues par coeur. Il connaît chaque impasse, chaque chemin de traverse, chaque galerie détournée, jusqu’au moindre pavé disjoint. Renard parmi les fourrées, il infiltre la nuit avec une aisance étrange. Elle est à la fois son refuge et sa pire ennemie. Elle jette des ombres sur ses pensées à vif, elle calfeutre les arêtes de sa mémoire, mais elle l’expose à tous les dangers, mais elle le fourvoie dans les ténèbres. Un instant, il s’arrête, foudroyé par une sueur glacé qui lui saisit les moelles. Il suspend sa foulée, embrasse le décor de son oeil d’archer, s’attardant sur des ridules à la surface d’une flaque de pluie, sans présence alentours. Et ne lambine pas. Une drôle d’intuition lui colle à la peau. L’irruption d’une rage qu’il croyait éteinte coule dans ses veines des déflagrations de soleil ardent. Il presse les pas, enfouit ses mains dans ses poches, s’allume furtivement une cigarette.

Il pénètre dans l’estaminet comme s’il y était un peu chez lui, salue quelques habitués d’un menu signe de tête et va s’asseoir à une table toute trouvée, vaguement en retrait, dans une encoignure de la salle. Là, une mousseuse l’attend, ainsi qu’un homme à la chemise trop fraîche. Poivre et sel, les yeux sombres, le visage émacié, l’homme n’a pas l’air d’être ici pour se fendre d’une causette pudibonde. Il se tient accoudé sur un corpus qu’il fait glisser vers Clide, avant de siroter distraitement sa chope. Clide compulse rapidement les documents avant de lever deux yeux perplexes sur son interlocuteur. Il s’apprête à lâcher une formule, quand ses yeux rippent. Il hallucine encore. Une silhouette est apparue entre les dos ratatinés, entre les épaules voûtées, entre les échines ramassées des usagers. Une silhouette de cristal, un piège à lumière et à regards, une aiguille, un chat au port altier surplombant la vermine. Deux gouttes d’absinthe dans les yeux. Une blancheur virginale, que les lumières ambiantes poudroient d’éclats mordorés. Ses yeux s’écarquillent alors que sa Vision se précise, alors que les ombres se reculent, apeurées par sa prestance lunaire. Il cligne des yeux à plusieurs reprises, sidéré. La Chimère ne s’évente pas pour autant. D’habitude, elle s’évapore dès lors l’a t-elle troublé. Elle se contente de le maudire, de lui apparaître, de raviver des souvenirs encore dégoulinants et de jouer rip. Cette fois le sortilège taraude. Clide ferme un instant les yeux, masse ses tempes, déglutit une bonne gorgée de salive. Le mégot de sa cigarette tombe à même la table, noircissant le bois lustré.

- Ca va, Dagorn ?
- Oui. Petite nuit... Où as-tu trouvé ça ?


Lâche t-il, histoire de repriser un peu la conversation. Il détourne péniblement les yeux de l’apparition. Car cela ne peut pas être Elle. Maluenda n’est pas ici, à portée de ses yeux, de ses mains, de ses pas, dans ce petit bistrot caché dans la lie urbaine. Maluenda n’est plus qu’une ombre dans les ombres, qu’une hallucinose dansant dans les vapeurs éthyliques, dans les scories des rêves, dans les ornières des cauchemars. Maluenda est loin. Sur une autre planète. Dans une autre strate de la réalité. Et ce n’est pas cette lavasse qui va lui remettre les pieds sur terre. Allons-y pour un Whisky.
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Message par Maluenda Caliente Mer 26 Déc - 22:42

La tension assassine Maluenda dès qu'elle a fait trois pas. Contrairement à ce qu'elle a cru, le Fils du Soleil est déjà présent dans le bar minable qui brûle ses sens.  Il est là. La reconnaissance est sans appel. C'est d'abord son odeur, son odeur qui trace un sillon parfait au dessus de toutes les autres. Ses aromes uniques de cuir, cigarettes qui peuplent celles de sa peau. Avant qu'une note plus claire ne chante. Un épis de son cœur gelé se brise et decoupe des lambeaux de veines et d'artere, circulant dans son corps sans obstacle pour une constatation impie. Une femme partage ses draps, ou ses nuits. La Madone a évité toutes parties trop personnelles des rapports. Refusant ce vice capital. Puis le grondement de son sang.  Si familier. Unique à cet homme. Pourtant, pourtant le rythme est bafoué, saugrenu.

Assise à la table, l’Epine étend ses résonances, cherche à creuser cette anomalie qui lui deplait à un niveau primal. Mais elle est distraite dans sa quête. Une vodka lui est apportée, elle n'en a cure. Car ses yeux d’émeraude liquide le voit Enfin. Il… est l'homme que ses traits encore juvéniles promettaient. Ses epaules ont les angles acides de celles qui ignorent le repos. Son visage. Elle ferme les paupieres et ses traits arborent un vide pictural. Nul ne saura ce qui défile sous ce canevas opalin. C'est une souffrance bien douce d'être si proche de lui. Il est si loin. Séparés par génomes qui se haissent. Toutes les molecules qui la composent pleurent la distance qui est la leur. L'absence de son corps contre le sien est une cruauté qu'elle s'inflige sans ciller.  Puis, elle rouvre les yeux. Et leurs regards se croisent. Il se détourne. Ses levres se pincent devant cet affront d'enfant. Il veut jouer à cela ? Oh Clide ? Vraiment ? Ce camouflet lui ressemble.

Dans le troquet, insidieusement, l'atmosphère se modifie. La Présence Vampirique joue sur les songes humains. Les buveurs, mêmes ceux dont le foie n'est plus qu'un vague souvenir, delaissent leurs verres. Les regards tournoient vers l'esseulée, se font plus profonds, plus inquisiteurs. Les murmures sont de concupiscences et de rêves de luxure. Elle entends tout, sans qu'un soupçon de sourire n'ourle ses lèvres carmines. Elle se voit se lever, se placer au centre de la pièce. Sa Bete gronde et feule, maintenue en cage. D'un mouvement, elle trancherait les gorges de ces agneaux sacrificiels. Il ne lui suffirait que des rapières de nacre qui maintiennent ses meches corbeaux. Mais Maluenda reste immobile. Elle n'a aucune envie de jouer les bourreaux de ces moutons ignares. L'un d'eux, plus téméraire ou plus stupide finit par quitter son tabouret et franchit en trois enjambées bravaches l'espace qui le sépare de la table nimbée de pénombre.

-Mademoiselle, puis je vous offrir quelque chose ?
-Non. Je n'ai pas envie de te boire.
si douce, si tendre, si languide. Une tentation délicieusement mordorée.
La formulation enchante le mortel, nul doute que cette étrangère qui s'est exprimée dans un polonais chantant a commis là une menue faute qu'il serait maladroit de corriger. Il a la vie sauve parce que la simple perspective de boire à ce cou crasseux l'ecoeure. Pas un mot de plus, alors qu'il se retire, penaud. Machinalement, elle a sorti un bloc de dessin et quelques fuseaux. Ses pensées ne sont ancrées que vers sa Nemesis, pourtant, ce ne sont pas ses traits qui émergent du papier. Une décision est prise. Il y a sept ans, elle n'aurait jamais agi ainsi. Mais elle se voulait plus humaine qu'elle ne l'était. Elle a trop adouci sa nature pour cet insolent egoiste. Pour qu'il ne cesse de la piétiner et de la mépriser pour sa Nuit. C'est terminé. Elle a cessé de se raccrocher à des lambeaux d'une humanité qui la rejette. Son Aura referme ses ailes sur Clide. L'enlace etroitement. Le Poison de Givre n'a quasiment jamais usé de ses dons sur le guerrier au nom de notions qui ne la concernent plus. Ce soir, elle pille sans un frisson de remords ses défenses mentales et plongent dans ses pensées superficielles. Avant de se rejeter en arriere presque immédiatement. Son crayon a vrillé sur la feuille, la dechirant presque. Une hallucination. Une vision. Une illusion. Il ne la perçoit pas vraiment. Elle n'existe plus dans sa réalité, pas cette nuit. Il ne lui a fallut qu'un battement d'aile de faucon.

L'homme econduit retrouve sa caravane de buveurs et les moqueries fusent. Jusqu'à un coup de coude donné au jeune homme assis en solitaire

-Hey, Dagorn, tu veux pas tenter ta chance ? T'as la gueule moins cassée que nous !

Puis c'est la voix de sirène qui perce le brouhaha des conversations. Elle ne hausse pas le ton, pourtant son timbre traverse la pièce comme sur l'onde limpide

-Dagorn, j'ai à t'entretenir.

Grognements de déceptions et gloutonnement d'envie. La chance, c est toujours pour les memes.
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Message par Clide Dagorn Jeu 27 Déc - 1:21

- Bordel, tu m’écoutes, Dagorn ?

Clide retourne à son indic un regard hagard. Il a perdu le fil, bien sûr. Les conversations ambiantes forment dans sa tête un galimatias pénible tandis que les lignes des documents confidentiels dansent une gigue éreintante. A la vérité, l’attention de Clide chaloupe dangereusement. Fait des allers retours incessants entre son informateur et l’Apparition, à quelques tablées de là. Le souvenir lancinant de Maluenda lui a déjà joué des tours funestes. Il a hanté ses nuits et miné ses jours. Il a fouaillé longuement son crâne et fauché vivement ses entrailles. Il a déposé sur le monde une pellicule fade, sur les sensations des voiles de poussières, qui l’ont poussé à repousser toujours plus loin la frontière des périls pour se sentir vivant. Le souvenir de Maluenda, injecté dans les nerfs de ses doigts... L’aura de Maluenda, qui a teinté l’univers entier de ses sens fut-un temps, a laissé un vide fuligineux qui a vu s’étendre une causse cuisante là où jadis siégeait une forêt. Non. Clide refuse de complaire à ses vieux démons. Il refuse de succomber à ces tentations médiocres, à ces appâts minables que lui tend une folie furieuse.

Il s’accroche au monde tangible. Aux noeuds du bois, aux auréoles de bière qui empoissent la table. Aux odeurs épouvantables de graillons, de sueurs et d’alcools forts qui tourbillonnent dans le grand hall. Aux lumières tamisées, qui parent d’enchantements un mobilier vermoulu et une tapisserie rognée par l’humidité vespérale. Son vis à vis marque un silence, comme s’il croyait à une migraine carabinée... que Clide ne dément pas. Il passe une main sur son front, s’essayant à refouler le foisonnement ophidien de ses pensées. Et c’est à cet instant précis qu’il le sent. Un intrus coulé dans sa tête. C’est comme remarquer un fil de pêche tendu qui se mettrait à capter des particules de lumière. C’est comme remarquer une ombre qui ne répond d’aucun relief, d’aucune saillie, d’aucune levée. Et cet intrus, cette présence discrète qui s’insinue dans ses pensées telle une anguille dans l’eau saumâtre ne lui est pas étrangère. Elle offre une double résonnance à la Vision qui s’ébroue juste sous ses yeux. Il sait parfaitement quoi faire pour obturer son esprit. Se concentrer sur de chiches détails de son environnement jusqu’à dépouiller ses pensées, jusqu’à désosser le cours de ses idées fusantes. Mais cette fois, il titube dans l’exercice maintes fois reproduit et réussi. Il vacille. Il connaît, cette empreinte. Ce sillage d’éther. L’atmosphère en personne résonne différemment.

Les vieux gaziers le raillent et il les écoute à peine, alors que l’impossible le transperce. Alors qu’il réalise que son fantôme est de chair et d’os. Alors qu’il comprend que ses démons ont quitté l’outre-monde pour lui tomber dessus. Elle le hèle avec une monocordie qui le télescope. Elle ne se lève pas, non. Elle garde son statut d’inaccessible, son immobilité hiératique alors qu’autour d’elle, la presse des buveurs s’émoustille. Il voit rouge. Il voit noir. Il voit de manière éclatante et criarde, comme si elle avait jeté des lumières crues dans l’obscurité dans laquelle il s’est terré de longues années durant. Il se lève. Non. Il bondit, propulsé par les muscles secs que la vie, l’action, la course et la fureur lui ont taillé dans le granit. Il jaillit, s’apprête à fondre sur elle. Sans savoir s’il compte l’étreindre puissamment ou la saisir à la gorge. Sans savoir s’il va l’embrasser furieusement ou lui briser tous les os. Ses veines enflent des pulsions enfouies, qui bourgeonnent comme des abcès à la lueur des fourneaux. Son ventre se fore. Ses tripes fulminent. Ses mâchoires se compriment pour retenir au fond de son gosier des cris rauques qui l’ont déjà réduit au silence. Sept ans plus tôt. Et sa réaction est si brutale, si sauvage, que tous les jolis coeurs à la ronde y voient un éclat de rage. Prompt à dégénérer. Toute une bande de joyeux lurons se ruent sur Clide pour le faucher en plein élan. Une table se renverse. Des chopes éclatent. Ils l’agrippent aux entournures, aux encoudées, à la gorge, aux replis de son blouson, là où ils peuvent. Malgré leurs manières rustres, ils n’usent pourtant d’aucune violence et semblent agir dans un esprit de contenance gaillarde.

- Dagorn, qu’est ce qui t’arrive ?
- Tu la connais ?
- Allez, non, tu l’as déjà sautée ?
-  Qu’est ce que t’as ? Encore une sale pute, pas vrai ?
- Dagorn... Fais pas de conneries.
- Tu vas pas t’en prendre à une minette, bonhomme que t’es ?


Et Dagorn ne bouge pas d’un iota. A l’impulsivité feu succède une immobilité statuaire qui semble un carcan de glace, une malédiction de sel. Il respire vite, toutefois. Un soufflet de forge qui lâche dans l’atmosphère des sifflements caverneux. Il la toise avec hauteur, comme s’il ne souffrait pas ses entraves de chair, comme s’il pouvait s’en défaire en un tournemain. Mais les gars mettent du coeur à l’ouvrage et maintiennent un siège digne de ce nom. Clide étire ses phalanges pour sentir refluer au bout de ses doigts un sang qui l'ébouillante.

- Il va falloir que tu viennes, Maluenda, gronde t-il.

Sans ciller. Sans rire. Sans crier. Sans provocations ni intimidations.
Un léger tremblement, dans sa voix. Non pas le tremblement de la peur couvée, mais du corps sous tension, de la rage coulant à flots qui laisse la chair échaudée, saisie à blanc.
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Message par Maluenda Caliente Ven 28 Déc - 0:00

Juin 2014, Varsovie


L’audience avec Piotr Vassili, le Trèmère qui règne sur l’enclave de la Baltique ne va plus tarder à s’ouvrir et les courtisans se pressent pour écouter et disserter entre eux. Rares sont les élus à pouvoir s’entretenir en privé avec le Pouvoir de la Camarilla et les spéculations vont bon train. Le Primogène de la Ville, l’équivalent vampirique d’un maire, Davi Maringol ne tarde pas à faire son entrée et c’est lui qui se charge des annonces.


-Justicar Caliente, le Prince aimerait vous voir au sujet des débordements causés par la Halastra dans le coeur et les environs de Varsovie


La Toréador a repris depuis 2012 sa place et son rôle au sein de la Camarilla, retrouvant avec plaisir les eaux boueuses de la politique. Son association notoire avec un assamite de la Main Noire, ses divergences passées avec son Clan, sa déchéance, tout ceci est oublié tant les intuitions et sa manière de régler les conflits sont sans appel. Ainsi, elle a été élu à Venise en 2013 par le Cercle pour représenter les Toréadors. Pendant treize ans, elle a presque un pouvoir absolu sur les autres Fils de Cain, chargé entre autre de répondre aux problèmes que certains pontiffes peuvent rencontrer sur leurs territoires. Elle a rapidement acquis une réputation dangereuse. Et si elle navigue facilement dans le bassin européen, il est notoire qu’elle est basée en Pologne. Ce qui pour l’heure est une bénédiction et une épine pour le Prince de Varsovie. La Rose ne se retourne pas sur les murmures et précède le Primogène jusqu’aux quartiers privés du Prince. Le décor ne l’interesse pas alors que déjà le sombre Magicien la toise de sa haute taille.



-Quand comptez vous agir de manière indélébile ? Ces Chasseurs commencent à provoquer des vagues indésirables. Il ne s’agit pas de mortels désoeuvrés mais de guerriers dont l’arsenal moderne est d’une efficacité redoutable.
-Je n’en ai pas l’intention. Ils agissent comme je l’entend. –Pas un sourire n’égaye son visage de marbre et son regard est d’une sévérité impitoyable.
-Je ne comprends pas. Je ne désire pas ajouter croyances aux rumeurs disant que vous avez des intérets personnels au sein de ce Groupe, mais...
-Suffit !- Le timbre de sa voix n’a pas bougé. Ne s’est pas modifié mais l’autorité en est indiscutable. – Ne soyez pas aveugle. Regardez leurs cibles ! Ces humains font le menage dans les rangs les plus turbulents sans que nous ayons besoin de nous salir le main.

Réduit au silence, le Vampire casse l’espace jusqu’à son bureau pour étudier de plus pret les listings des immortels frappés par les chasseurs. Son visage trahit l’incrédulité puis il finit par comprendre là où voulait en venir la Toréador.
-Ils s’attaquent à ceux qui menacent notre Nuit par trop d’Orgueil. Qui oublient que nous oeuvront dans les Ombres .
-Ceux qui attirent leurs attentions méritent leurs fins sans gloire, prononce la Rose. Le Prince jette un long regard à l’Artiste, où se mèle admiration et une pointe de crainte bien justifié. Il se rapproche pour effleurer les épaules offertes à la Lune de la cainite.
-Vous êtes redoutable, Maluenda.


******

La Diablesse perçoit immédiatement le changement d’intensité chez le Mortel. L’instant où elle passe de songe à cauchemar bien réel. Ses doigts continuent le portrait issue de sa mémoire, tandis que ses yeux harponnent son visage. Est ce qu’elle aime sa barbe ? Mais déjà il agit. Fauve prédateur. Elle reste immobile. Maluenda ignore ses intentions, qu’aurait il fait si il n’avait pas été entravé par ses congénères ? Aucune envie de plonger dans les remous de ses pensées pour Ca. Un éclat rouge rubis trouble ses iris verdoyant à le voir ainsi enchainé et l’un de ses geôliers relâche immédiatement sa prise. Pourtant. Il a révé. Il en est sur. Mais l’espace d’un instant, il aurait juré qu’elle s’apprétait à lui arracher la tête. Pas un de ses muscles n’a tressaillé. Peut être.


Il est fier. Si fier. Elle l’est tout autant. Finalement, elle repousse sa chaise et sabre l’espace qui les sépare. Une vague crispation du poignet, à peine, à sa proximité. Son corps vient de briser sous les molaires de son esprit une graine de frustration qui enrobe un pepin d’amertume. Il la surplombe si parfaitement et le creux de son épaule appelle sa tête au repos. Son souffle sur sa peau. Rien ne trahit le venin de ses sensation, bloc de marbre délicatement ciselé qui n’offre aucune prise aux éléments. Une parfaite indifférence. D’ailleurs, ce n’est pas à lui qu’elle s’adresse. Mais à ceux qui lentement le libèrent de leurs mains. Le moment est passé. Ils le sentent.


-Pardonnez le, je suis, j’étais sa fiancée...
L’attention est captée, ils devinent une histoire d’amour funeste qui s’est mal terminé, un conte qu’ils pourront partager avec leurs femmes en retrouvant leurs pénates. La voix de Maluenda se module pour des accents de sortilèges de temps anciens, sans accorder la moindre importance au Foudre qui résonne si ardamment.
-Il ne m’a pas dit Oui, voyez vous, au tout dernier moment, il ne m’ a pas dit oui. Vous comprendrez qu’une femme ainsi bafouée se doit de garder sa fierté, sa dignité. Je n’avais donc pas l’intention de le revoir, pas avant plusieurs siècles, au moins !. L’éternité n’est pas assez longue pour apaiser une telle blessure, une telle gifle. Vous pouvez donc comprendre le choc qu’il doit ressentir ce soir après tout ce temps passé.
Les murmures acquiescent. Une telle femme, abandonnée devant l’autel, la rupture ne pouvait être que franche et totale. Comme un membre gangrené.
-Je comprends, par moment qu’il ait souhaité tourné le dos à l’avenir que je représente. Il est certain que le soleil n’aurait pas toujours brillé et que les difficultés étaient réelle. J’étais prête à les surmonter. Pour lui. Ce qui n’était pas son cas. De toute évidence... Ma famille n’approuvait pas notre union et a eu un comportement déplorable à son égard. Mais Clide n’était pas innocent non plus ! Il a professé plusieurs fois son mépris à l’égard de ma Soeur. Elle est un peu brutale, un peu sauvage, elle a des accès de violence. Mais c’est ma soeur jumelle et je refuse de la renier, même pour lui.
Un demi cercle s’est formé autour d’eux et ils sont suspendus à ses lèvres. Ils Voient. Ils voient ce qu’elle leur explique. Et pas un homme présent ne jure par devant lui qu’il aurait eu un comportement différent. Qu’il aurait accompagné cette apparition au bout de l’enfer. Sans qu’ils ne condamnent Clide pour autant. Ils savent les faiblesses de leur sang.
-Mes belles résolutions se sont envolées quand un cadavre de mon passé a refait surface. J’aurais pourtant juré que cela faisait au moins deux siècles qu’il était Mort tant j’étais persuadée que cet épisode était clos. Mais je crains qu’il ne cherche des noises à Clide, simplement parce que nous étions fiancés. En toute décence, je ne pouvais supporter hypothèse qu’il cherche à s’en prendre à lui physiquement sans qu’il ne soit averti.
Non bien sur- Ils n’ont pas tous des passés lisses et imaginent parfaitement ce que produiraient certains épisodes revenant à la surface. Oui, il serait désagréable de devoir faire face à une ancienne flamme, mais la morale l’exige. Oui. Bien sur.
-Je vous assure que le sang ne coulera pas ce soir entre Clide et moi.

Pas un mot de plus alors qu’elle se détourne. Les regards la suivent, hypnotisés et envoûtés sans en comprendre la raison réelle. Ce n’est que lorsque elle est quasiment dehors qu’elle lance au Guerrier, sans modifier l’onde de sa démarche. Pas une fois leurs prunelles ne se seront croisées et elle aura évité tout contact physique par l’étendue de sa célérité. Offfrant à ses dérobades la subtilité d’un roseau, imperceptible par leur audience.
-J’ai vraiment à te parler.
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Message par Clide Dagorn Lun 7 Jan - 19:30

L’orage est passé. La poigne des gars se délite en douceur, quelques tapes amicales poinçonnent ses omoplates et ses larges épaules. Une lueur nitide semble aveugler toutes les pulsions de violence et de force qui ruaient dans l’atmosphère, électrique, qui désormais s’emplit de chaleur humaine. Les bougres pressentent qu’il s’agit d’une sale histoire, et l’amitié qu’ils lui portent les lui attache aussi fidèlement que les têtes d’un chenil. Après tout, tous ces quidams qui se pressent au comptoir pour vider un godet viennent chercher la tiédeur du compagnonnage dans les longues nuits d’hiver. Rien d’autre. Clide retrouve sa liberté de mouvement. L’empoignade qui recule le laisse à moitié dépoitraillé de son cuir, les pommettes fouettées de sang chaud, le front et le cou marqués de petites veines retorses. Et les poings verrouillés, si fermes qu’il pourrait y concasser des noix. Les gars ignorent tout, du fondement du problème. Les gars boivent les paroles de la fiancée éconduite. Les gars, ces châssis taillés comme des buffets à vaisselle, sentent se retourner leurs jolies tripes de cousette à mesure que la conteuse déverse sa terrible histoire. Les cœurs se serrent, quelques regards ripent sur l’échine de Clide. Clide qui fait front, phare dans la tempête, obélisque immuable dans ce torrent d’émotions qu’on suscite, qu’on malmène, qu’on manipule.

Oh, elle ne ment pas. Chaque mot à franchir ses lèvres peintes est un charbon ardent. Chaque mot se fait nécromant et ravive l’éclat de spectres. Chaque mot est écharde, tesson, sarment qui agrippe les chevilles et les frusques de l’éperdu coureur. Qui le fauche en plein élan, le condamne à mordre la poussière ne serait-ce qu’un instant, l'oblige à regarder en arrière. Des chiens. Des chiens qui s’engouffrent dans ses pas, qui grognent et mordent. Une huée de crocs et de griffes qu’il avait pratiquement semée.

Un sang vigoureux bombarde littéralement ses tempes. Le Renard ne s’entend plus penser. Il se cristallise de rage et d’horreur alors que ses compagnons s’amollissent, ballottés par le triste conte. Le prodige de sa voix frisante les hypnotise, et Clide met un point d’honneur à ne pas succomber à ce nouveau charme captieux, à ne pas se retourner sur la mélancolie qui lui tend les bras. De tout temps, sa rage l’ébouillante à l’heure des grands froids. Sa haine frigorifie son sang, ses moelles et sa lymphe alors que les vapeurs magiques l’acculent. Méticuleusement, il époussette les pans de son blouson défait alors qu’elle enrobe. Il tire sur son col, froissé par l’échauffourée, tandis qu’elle chante. Des gestes mécaniques. Des petits gardes-fou, qui lui valent des œillades exorbitées. Clide Dagorn serait-il un monstre, un bourreau des cœurs, un scélérat sans pitié ? Ne vibre t-il pas, ne serait-ce qu’un peu, devant le spectacle lancinant de sa mie éplorée ? Certains se scandalisent, promettent à la belle enfant une dévotion exemplaire. Quelques rares chafouins devinent que les choses sont infiniment plus complexes. Éternellement, plus complexes.

Un éclat effronté, dans ses prunelles aux nuances de bois calciné. Elle oublie quelques détails, n’est-ce pas ? Elle polit les dents des loups et sème des fleurs dans les forêts sombres, élues pour terrain de chasse. A couvert d’un rictus hostile, Clide passe sa langue sur ses dents, sur ses propres canines. Il s’accroche à quelques sensations déplaisantes afin de ne pas s’évaporer dans une nouvelle pulsion de colère. A la réalité de l’émail burinant sa lèvre inférieure. Si les poivrots n’avaient pas été là, jamais ne lui aurait-il permis de parachever son récit. Jamais n’aurait-il eu la patience, pour ses émois fantoches. L’idée qu’elle ne fait que tisser sa toile, que jouer une partition, qu’instrumentaliser leur histoire, est si tentante. Si facile. Clide se complaît à faire la sourde oreille, lorsque fourche la langue de l’hydre, lorsque d’infinitésimales vibrations font tressaillir quelques mots.

Un avertissement. Qu’elle ne prend pas même soin d’enrubanner. Moment où la prunelle de Clide, après s’être voilée d’ombres, retrouve son éclat de vif-argent. Est-ce là rouerie, vérité vraie ? Quoique Malendua, dans sa subtilité magnifique, sait l’art de servir ses intérêts en travestissant à peine des faits établis. Alors qu’elle se retire, se faisant un manteau du mystère qui a gorgé la pièce, le Chasseur reste un instant à quia. Il ne craint pas pour l’entrevue qui va suivre. Du moins, il ne craint pas pour sa vie, pour sa chair, pour sa peau que le diable réclame encore, à cor et à cris, pour laquelle le diable lève l’enchère, nuit après nuit. La seule chose qu’il redoute, c’est lui. Ce sont ses accès de rage, qui ne préviennent jamais. Ce sont les décrochements de son cœur, qui lui coupent les jambes quand bon leur chantent. Ce sont la fulgurance de vieux souvenirs, qu’il avait mis en bière, en vodka, en whisky. Il tremble, déjà. Carcasse trop pleine de vie. Carcasse qui craque, qui crique et qui croque. Des os qui vibrent comme des charpentes offertes à l’échelle de Richter. Et ses yeux, sphères de verre emplit de flammes alchimiques.

C’est drôle, mais les autres zèbres, sidérés par la terrible narration de Maluenda Caliente, n’osent même pas lui décocher la moindre vacherie, comme il est d’usage entre gros durs. Pas le moindre mot. Il règne dans l’estaminet un silence bien digne d’un lointain désert de Sel. Une minute se passe. Une grosse paluche se pose sur son épaule, délicate comme un pétale. Un mastoc, à la gueule couturée, au museau prognathe, qui ne parle jamais pour ne rien dire.

« Clide. Laisse-la. Reste avec nous. Tu veux une binouze ?
- Non.
- Clide, qu’est ce que…
»

Clide ne répond pas, et le lourdaud, qui a plus d’un pois chiche dans la cervelle, a l’intelligence de ne pas renchérir. Il reconnaît un homme dangereux quand il en voit un. Il sait le regard d’un dément à celui d’un zélé, à entre les deux, le Renard penche grièvement d’un coté.

Dans un silence, il suit Maluenda. Il marche lentement, s’engouffre dans son sillage parfumé et ombrageux. Il suit ce sentier dans l’air duquel volètent des frimas qui n’appartiennent pas à l’hiver. Il a l’impression de descendre dans une grande gueule caverneuse, qui lui cracherait au visage son haleine d’outre tombe, de se fondre dans un mirage méphitique pour y suivre une madrée sirène, reine en son royaume. Au dehors, elle l’attend dans cette ruelle mal famée, gagnée de sinistrose. Diaphane, elle luit comme un fragment de lune qui aurait chu dans les fosses d’une planète de fer et d’hélium, piégeant dans la neige carbonique de sa peau tous les photons à la ronde. Elle irradie, charme la nuit, qui tord sa voûte pour mieux la couronner. Clide gratte son zippo, s’allume une cibiche. Il n’est pas vraiment l’heure de résister à ces petits démons complaisants, à l’heure où la diablesse lui fait face. Cela lui donne un semblant de contenance. Cela altère un peu le vernis froid du tableau qu’ils forment. Dans sa poitrine, son cœur hésite, trébuche, bondit, se marave. Tiens bon, vieux truc. Je crois qu’on préfère tous les deux la violence sous une forme plus… Brute.

« Eh bien ? Qui veut ma peau ? La liste commence à être longue. »

Gronde t-il. Se refusant à se perdre en de longs atermoiements. Se refusant à des préludes plus personnels, plus intimes, plus fracassants. Qui auraient fatalement raison de sa patience. De sa retenue. De sa dignité. Un œil pour le ruban de ciel étoilé, qui file entre les hauteurs tuilées. Les étoiles lui paraissent des grains de sel, luisant comme de la pyrite, prêtes à enflammer les meurtrissures d’hier. D’il y a sept ans.

« Et je n’ai pas le temps, pour tout le monde. Pas l'envie, non plus. »

Une réplique cuite à blanc.
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Message par Maluenda Caliente Lun 7 Jan - 22:55

Campagne de Blois, Février 1908


La nit est glaciale, glacée. La petite silhouette titube et tombe dans un tas de neige compactée par les bourrasques de vent qui ne cessent de hurler. Elle s’enfonce presque jusqu’à la taille. Il faut d’innombrables minutes pour retrouver un semblant de stabilité, pour parvenir à s’extraire de ce piège poudreux. Lorsqu’elle retrouve le sentier à peine visible, la nacre délicate de la neige est défigurée par de longues trainées d’un rouge sale.
Pour la première fois depuis des décenies, Maluenda est transie par le froid qui règne en maitre. Son métabolisme surnaturel ne parvient pas à monter ses défenses habituelles et la robe qui la couvre est bien trop légère. Le tissu gorgé de flocons détrempés, déchirés en de multiples endroit brise sa célérité et la grace mutine de ses mouvements. Chaque pas est une torture. Pourtant, malgré cela, il lui arrive régulièrement de plonger ses bras jusqu’au coude dans la neige. Soupire de soulagement. Un éclat ambré permet de distinguer de vilaines estafflilades sur ses mains et ses bras, des ciselures profondes, des brulures bijoux supurantes qui peinent à se refermer. Ses crocs luisent d’une lueur malade quand enfin elle parvient à l’orée d’un garage qui referme la fierté de Philémond. La porte s’ouvre dans un grincement qui heurte son ouie. Ses doigts malabiles prennent une éternité à faire demarer le moteur à manivelle et lorsque le fer heurte ses mains, elle glisse contre la carlingue, luttant contre l’inconscience. Pourtant, quand enfin le véhicule ronronne, que les larges pneus suivent la route verglacée, c’est sous une lumière vive qui concurencerait presque le soleil. Dans son dos, sans qu’elle ne se retourne, brule et se calcine les fondations du Manoir de Chasse anscetral des de Boiseaux

********

Elle offre et délie le conte de leurs relations massacrées à ces hommes pour lesquels elle n’eprouve rien. Ni complaisance ni mépris. Une absence total d’affect, elle n’aurait aucune reaction si le sol s’ouvrait pour les avaler. Celui qu’ils entourent, protègent, presque... C’est différent. Une différence qui détruit l’indifférence dont elle se masque si bien. Si pas un regard, pas un touché ne divague vers le Guerrier, ses sens ne le quittent pas. A l’affut des reactions muettes de ce corps qu’elle connait si bien. Sa colère est une flambée de bois sec. Délicieuse, familière, chalereuse. Car si une telle rage l’anime... il est Vivant. Pas simplement debout. Il est Vivant et il ne l’a pas oublié, dans sa si courte mémoire de vivant. Dans l’intensité de ces heures qui les dévorent, Clide n’a pas raturé tout de sa mémoire. L’Artiste a essayé. Sachant que c’était vain. Qu’il était inscrit sous sa peau et gravé dans sa Nuit. Ses Iris d’Absinthe se dérobent, sans cesse. Refusent de sombrer dans ses prunelles qu’elle a bannit de ses crayons.

Lacheté qu’il pourrait reconnaitre si sa colère ne lui hotait pas sa capacité à tout deviner. Elle l’armure autant qu’elle l’aveugle et Maluenda n’a pas la bravoure de s’exposer sans sa présence. Elle attise sa rage. Nourrit son irritation comme on prendrait soin d’un molosse qui pourrait vous arracher un membre d’une caresse. La beauté de ses mots réside dans ces semi verités parés d’ombres. Il les reconnaitra. Elle le sait. L’espère, peut être. C’est là toute la difficulté. La Sinueuse a Besoin qu’il la croit. Besoin qu’il écoute avec plus que sa furie. Et sa posture se modifie. Il a comprit. Malgré lui, son attention se fait aiguisée et flèche. Il creuse au delà de ses paroles d’ange délicat.

Départ de son théatre. Il ne suit pas. Déjà, elle a gagné la ruelle. Il n’est pas là. Non, Clide. Harponne ta fierté et ecoute moi ! Pourtant, elle musèle son impatience. Refuse de retrouver le boui-boui. Pis, elle quitte la porte éclairée pour la crasse d’une ruelle atténante où ils n’auront pas de témoins. Les secondes s’égrainent et elle se jure qu’elle va lui tordre le cou si il n’apparait pas ! Pas plus d’une poignée pourtant ne doivent mourir avant qu’il ne la rejoigne. Sans mots dires, ils s’enfoncent encore entre les murs qui se rapprochent, boyeaux oublié de l’éclairage public. Elle n’en a pas besoin. Lui non plus. Quand il sort sa cigarette, quand il l’allume, la Venitienne use de sa célérité sans une pensée. Dérobe une clope. L’allume à la même flamme et déjà, recule. Ne se fait pas confiance pour le moindre vol digital.

Son oeil se perd dans la danse languide de la cigarette à ses lèvres. Son regard s’abime sur cette bouche qui disparait presque sous le duvet mal rasé. Le rougeoiement gresille et elle oublie celle qu’elle tient en main. Les paroles qu’il prononce lui parviennent, ouatté- Ho, non, pas ta peau, la mienne, lui parvient la reponse, distraite. Défocalisée. La Folie du Sang Toréador brille presque sans égal chez Maluenda et il connait bien ces transes qui peuvent la saisir. Cette fois, elle ne le quitte plus du regard. Ses iris verdoyants glissent sur le bout de ses doigts. Reviennent à sa bouche, toujours. Ellle dessinne, imprime dans ses souvenirs l’angle exact du narquois de sa lèvre. Du point de lumière. Elle ne devrait pas. Elle devrait lutter, mais elle est entrainée, l’onde de son inspiration la noie, fascinée par ce visage murit, si semblable et si différent. Maluenda n’est jamais plus candide que dans ces instants brutales qui l’arrachent à la réalité du moment. Elle en sécurité. Personne. Il ne permettrait à personne de lui porter atteinte. La force de frappe de la Halastra descendrait à cet instant qu’elle n’en aurait pas conscience. Altair l’a déjà sauvé plusieurs fois d’elle même, au cours de leurs siecles de barbarie. Le Renard deviendrait loup. Ou pas, Ces considérations ne l’effleurent pas.

Elle entend l’insulte. Ne la retient pas. C’est sa Bête qui le fait pour elle. Il n’a pas le temps. Il n’a pas le temps pour elle. Sa cigarette tombe au sol, la cendre n’ayant pas eu le temps de s’accumuler. Il pourrait être offensé de son comportement, elle ne comprendrait pas. Tout lui file entre les doigts, sinon cette urgence qui va au delà de la Soif. Maluenda s’est approchée de lui et du bout des doigts, accroche son menton pour qu’un faible rayonnement de lune rebondisse sur sa paumette couturée. –Comme ca, Clide. Ne bouge pas. Je le croyais mort, sinon je l’aurais tué une seconde fois. –Rien que ces quelques paroles lui demandent un effort incroyable. L’oblige à divertir une partie de son attention de son tableau, torture. –Tu es le moyen le plus discret de parvenir à moi, celui qui n’éveillera pas l’attention de la Camarilla polonaise. Je ne le laisserai pas te toucher. Clide, ta montre déréglée m’agace. Profondément. Je l’entend. Mal synchronisée.

Car elle la percoit. Un battement sourd. Qui ne respecte pas de rythme. Qui offense la régularité. Qui résonne contre ses tempes. Qui l’empeche de plonger vraiment. Qui la retient. Parce qu’elle connait. Elle Sait. Et ca ne va pas. Quelque chose ne va pas. Plus elle se concentre dessus, plus sa peinture passe au second plan et l’accroche Toréador se relache. Plus elle écoute. Plus ca l’emppoigne. Malade. Ca la rend Malade. Ses yeux dérivent à nouveau. Jusqu’à ce que la conscience lui revienne comme un coup de fouet. Et soudain, elle pirouette. Sa paume aggripe l’épaule de Clide. Elle l’épingle au mur, le plaque contre la paroi et c’est un effroi dénudé qui prend vie dans ses prunelles avant qu’elle ne le fasse disparaitre. Elle a envahit son espace vital. A sentir son souffle sur sa peau.

-Qu’est ce que tu as fait. Puttana ! A quoi est ce que tu t’es amusé avec ton coeur ! Ne m’oblige pas à le découvrir par moi même ! Cretino Scuro ! Je n’ai pas retenu ton Etreinte au dernier moment pour que tu te démolisses, pour que tu foutes en l’air ! Et qu’est ce que tu fais, Porca puttana troia, avec des puttana de chasseurs de vampires ! Tu devrais être loin de ce cloaque !

Les insultes dans son italien natal sont tellement loin de son langage si parfaitement contenu. Une vanne vient de ceder. Une vanne de rage, de colère, d’envie de lui exploser la tête tellement il est con de continuer à se mettre en danger alors qu’elle a été au bout de ce qu’elle pouvait pour le protéger d’elle même. De lui même, si elle le pouvait. Une vane qui ouvre le flot de ses émotions contradictoires, qui trahit la main brutale qui lui arrache les entrailles dès qu’il est question de ce mortel bien trop tétu. Elle realise que sa prise n’a pas faiblit, qu’à ce rythme, elle pourrait presque lui demettre l’épaule. Il lui faut toute sa volonté pour esquisser un pas en arrière.

-Clide, bordel.
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